La fondation belge a le vent en poupe
Les nouvelles règles rendent cette forme juridique plus attrayante
Les Belges se tournent beaucoup moins vers la fondation néerlandaise pour céder ou ancrer leur entreprise familiale. En 2020, la création de fondations privées belges a augmenté de plus de moitié par rapport à l’année précédente. Le nombre de fondations faisant office de fiduciaires a même pratiquement triplé. Comment expliquer ce succès soudain ?
Rutger Van Boven, Partner BDO Tax, Estate Planning
Nouvelles règles, nouveaux avantages
L’ancienne mouture du Code des sociétés et des associations (CSA) prévoyait qu’une fondation belge devait compter au moins trois administrateurs. Le législateur voulait ainsi éviter qu’une seule personne tire la couverture à elle. C’est pourquoi de nombreux Belges préféraient se rendre aux Pays-Bas pour créer leur fondation ; la législation néerlandaise ne requiert en effet qu’un seul administrateur.
Maintenant que c’est également le cas chez nous, cette forme juridique est devenue beaucoup plus intéressante. Les inconvénients du passé ont disparu et cela se reflète dans les chiffres. Pas moins de 64% des fondations faisant office de fiduciaires créées en 2020 possèdent un seul administrateur.
Ce n’est pas le seul intérêt de la fondation made in Belgium. Les règles de transparence fiscale sont plus complexes aux Pays-Bas et l’identité des bénéficiaires effectifs de la fondation y est également publiée dans le registre UBO, accessible à tous (ce qui n’est pas le cas en Belgique).
« Les inconvénients de l’ancienne version de la fondation belge ont disparu. »
Un travail de création sur mesure
La création d’une fondation est un travail sur mesure. Soyez prudent et vigilant lorsque vous rédigez les statuts.
Si vous utilisez la fondation comme fiduciaire, définissez des règles claires valables plusieurs générations. Ces règles doivent notamment porter sur :
- La désignation de la direction.
- La politique de dividende et d’investissement.
- Les possibilités de sortie.
- Le cercle des personnes au sein duquel les certificats doivent être conservés.
Vous devez en outre fixer les conditions d’une éventuelle reprise. Imposer que l’ancrage belge perdure, par exemple, ou que l’emploi soit garanti après l’acquisition.
La fondation en tant que fiduciaire
Un dirigeant d’entreprise familiale qui effectue une donation d’actions souhaite souvent garder encore les rênes un certain temps, histoire que la prochaine génération puisse s’immerger progressivement dans les responsabilités inhérentes à la direction des affaires. En travaillant avec une fondation privée qui fait office de fiduciaire, vous scindez d’une certaine manière le contrôle de l’entreprise d’une part, et ses avantages patrimoniaux d’autre part. Les actions de l’entreprise sont transférées à la fondation qui émet en retour des certificats. L’organe de gestion de la fondation (qui est aussi son organe unique) exerce un droit de vote lors de l’assemblée générale de la société (ou holding) tandis que les titulaires de certificats ont droit à des dividendes, à une réduction de capital, au remboursement des apports ou au solde de liquidation en cas de dissolution. Vous gardez de cette manière le contrôle de l’entreprise et déterminez qui en prendra la direction après votre décès.
Même si vous ne cédez pas (encore) l’entreprise à vos enfants, vous voulez garantir l’avenir de l’entreprise familiale en cas de décès inopiné. La fondation vous permet d’en confier la direction à une (ou plusieurs) personne(s) de confiance ou ayant de l’expérience dans votre secteur d’activité, avec (ou sans) un (ou plusieurs) enfant(s) actif(s).
Aujourd’hui, un seul administrateur suffit pour une fondation belge, au lieu de trois auparavant.
La fondation permet par ailleurs d’éviter une fragmentation de l’actionnariat. Le regroupement des actions dans une fondation faisant office de fiduciaire permet de regrouper le droit de vote, de mener à bien le transfert des certificats/actions et de prévoir des possibilités de sortie (progressive).
La fondation utilisée comme fiduciaire est fiscalement transparente sous certaines conditions. Les dividendes versés par l’entreprise certifiée, transmis ensuite par la fondation aux détenteurs de certificats, ne sont pas soumis à une imposition supplémentaire. Autre intérêt : les obligations en matière de comptabilité et de comptes annuels sont réduites à l’essentiel.
La dissolution de la fondation faisant office de fiduciaire est régie par la loi
Une fondation agissant comme fiduciaire ne se dissout pas d’un simple claquement de doigts. La dissolution doit passer par le tribunal de l’entreprise et n’est possible que dans des cas spécifiques définis par la loi. Cela ne doit toutefois pas constituer un obstacle insurmontable. Si les certificats émis par la fondation sont préalablement convertis en actions (on parle alors de « décertification »), la fondation ne peut plus réaliser son objectif. Vous pouvez alors demander sa dissolution.
Multiples applications
Opter pour une fondation peut être utile pour d’autres applications qu’une fiduciaire.