Tout savoir à propos du système de carry back

En quoi consiste ce soutien fiscal lié à la crise du coronavirus ?

Les entrepreneurs sont nombreux à constater que leurs prévisions financières pour l’exercice en cours sont significativement impactées par la crise du coronavirus. Pour ne pas augmenter inutilement les coûts, le gouvernement a instauré le système de carry back. Il s’agit d’une déduction anticipée des pertes valable tant pour l’impôt des sociétés et l’impôt des personnes physiques que pour celui des non-résidents (sociétés/personnes physiques). Explications.

Auteurs : Amber Van Landeghem, Advisor, Liesbeth Debusschere, Manager BDO Tax

« Une fois le carry back demandé, tant l’application que le montant sont irrévocables et définitifs. »

Le carry back pour les sociétés

Grâce au système de carry back (également appelé « rétro-imputation des pertes » ou « déduction anticipée des pertes »), les entreprises peuvent imputer (une partie de) la perte attendue pour l’exercice en cours sur le résultat imposable positif de l’exercice clôturé entre le 13/03/2019 et le 31/07/2020. La société peut ainsi réduire ou neutraliser le coût de l’impôt des sociétés sur le plan financier ; une mesure qui tombe à pic en ces temps difficiles. La période initiale s’étendait jusqu’au 31/12/2020 mais la loi du 15/07/2020 l’a limitée au 31/07/2020. Conséquence : la déduction anticipée des pertes n’est possible que durant l’exercice d’imposition 2019 ou 2020, en fonction de la date de clôture de l’exercice.

Les sociétés ayant déjà effectué des versements anticipés sont remboursées du solde. Afin de renforcer les liquidités de ces sociétés, le SPF Finances a enrôlé durant le mois d’octobre 2020 les déclarations à l’impôt des sociétés et les déclarations à l’impôt des non-résidents (sociétés) introduites avant le 01/10/2020 inclus et recourant au régime de carry back. Les sociétés pouvant prétendre à un remboursement (partiel) de leurs versements anticipés pourront dès lors le recevoir avant la fin de l’année.

Exemple

Une société enregistre un résultat fiscal de 250.000 euros pour la période imposable clôturée au 31/12/2019. Ses prévisions pour l’exercice qui sera clôturé le 31/12/2020 prévoient une perte fiscale de 100.000 euros. Dans ce cas, la société peut faire appel au régime de carry back et constituer une réserve temporaire de 100.000 euros dans sa déclaration à l’impôt des sociétés pour l’exercice d’imposition 2020. Elle ne paiera donc l’impôt des sociétés que sur 150.000 euros. Si la société a déjà effectué des versements anticipés sur base d’un résultat attendu de 250.000 euros, elle récupèrera une partie de ces versements anticipés.

Comment intégrer le carry back dans sa déclaration ?

Dans la déclaration à l’impôt des sociétés/impôt des non-résidents (sociétés), vous devez reprendre en fin de période imposable la perte attendue comme réserve temporairement exonérée sous le code 1128 « Réserve en vue de renforcer la solvabilité et les fonds propres suite à la pandémie du COVID-19 ». Vous reprenez également, toujours en fin de période imposable, le même montant parmi les réserves imposées, mais en négatif. Pour ce faire, nous vous conseillons d’utiliser le code 1011 PN : « Autres réserves imposables ». Vous devez en outre introduire le relevé 275 COV correspondant. Si la déclaration a été introduite avant l’entrée en vigueur de la loi le 11/07/2020, vous pouvez demander une modification auprès de l’administration fiscale compétente. Dans ce cas, vous aurez jusqu’au 30/11/2020 pour transmettre à l’administration le relevé 275 COV.

La constitution de la réserve exonérée est limitée à 20 millions d’euros et au bénéfice imposable diminué de la déduction RDT et de la déduction pour revenus de brevet/d’innovation.

Aucune adaptation des chiffres n’est nécessaire d’un point de vue comptable. Notez qu’une surévaluation de la provision fiscale dans les comptes annuels approuvés est possible, étant donné que l’impôt des sociétés dû peut fortement varier après l’application du système de carry back.

Vous êtes tenu de reprendre les réserves constituées dans la déclaration de la période imposable suivante (c’est-à-dire l’année à laquelle se rapporte la perte attendue). Ce mouvement positif du résultat imposable sera imputé sur la perte comptable. L’entreprise doit aussi signaler une dépense non admise supplémentaire (code 1266) pour neutraliser l’effet de la diminution des taux de l’impôt des sociétés pendant l’exercice d’imposition 2021.

Sachez enfin que vous n’êtes pas obligé d’appliquer la règle du carry back. Le report de pertes fiscales étant illimité dans le temps, les entreprises réticentes peuvent toujours imputer les pertes fiscales sur le bénéfice imposable d’exercices d’imposition futurs.

Sanction en cas d’estimation exagérée des pertes

Les sociétés qui surestiment la perte attendue sont sanctionnées. S’il s’avère par la suite que la perte attendue a été surestimée de plus de 10%, une majoration d’impôt située entre 2% et 40% est appliquée sur la partie de la surestimation. La majoration d’impôt est calculée en fonction de l’écart avec la perte réelle. Elle n’est pas déductible.

Notre conseil : utilisez le système de carry back uniquement quand vous avez la certitude que l’exercice sera déficitaire, et avec toute la prudence nécessaire lors de l’estimation. Tenez également compte de l’impact sur d’autres corrections fiscales comme les déductions fiscales non reportables, le calcul du transfert intra-groupe et la limite des 50% liée au tax shelter.

Sociétés exclues

L’exposé des motifs relatif au système de carry back précise que la mesure est destinée « (…) aux entreprises saines qui présentent temporairement des problèmes de liquidités à la suite de l’épidémie de coronavirus ». C’est pourquoi certaines sociétés ne peuvent pas en bénéficier :

  • Les sociétés qui décident de distribuer des dividendes (bonus de liquidation et réserve de liquidation compris), de réduire leur capital ou de procéder à un rachat d’actions propres entre le 12/03/2020 et le jour du dépôt de leur déclaration à l’impôt des sociétés de l’exercice d’imposition 2021.

  • Les sociétés d’investissement et sociétés immobilières réglementées.

  • Les sociétés qui détiennent une participation auprès de sociétés établies dans un paradis fiscal ou qui effectuent des paiements à ces sociétés (à moins qu’elles puissent démontrer qu’il s’agit d’opérations réelles et sincères).

  • Les sociétés qui étaient déjà en difficulté avant la pandémie de Covid-19. La plupart de ces sociétés ne tireraient sans doute pas profit de la mesure car elles n’ont probablement pas enregistré de bons résultats au cours de la période du 13/03/2019 au 31/07/2020, sans compter qu’elles disposent peut-être déjà de pertes fiscales reportées.

« La société peut - mais ne doit pas - appliquer le système de carry back. »

Ne sont pas concernés :

  • Les entrepreneurs qui rencontraient déjà des difficultés financières avant le 18/03/2020.

  • Les contribuables qui utilisent les bases de taxation forfaitaires pour l’exercice d’imposition 2021 (année de revenus 2020) (cf. article 342, §1er, deuxième alinéa du Code des impôts sur les revenus 1992).

Le formulaire type prévu pour la déclaration à l’impôt des personnes physiques pour l’exercice d’imposition 2020 a été publié avant l’entrée en vigueur de la mesure de carry back. Toute personne qui souhaite recourir au carry back doit donc remplir le formulaire 276 COV. Une fois la demande introduite, tant son application que le montant y afférent sont irrévocables et définitifs.

« Les sociétés qui étaient déjà en difficulté avant la pandémie de Covid-19 ne peuvent pas bénéficier du carry back. »

Plus d’infos à propos du système de carry back et de son application ? Besoin d’aide pour analyser votre situation ? Contactez les experts de notre équipe Tax : tax@bdo.be.